Du Forty Elephants gang à un escape game virtuel

Escape Gang, c’est le nom d’une association créée par des étudiantes en communication de l’Université de Lille. Dans le cadre d’un projet universitaire, elles ont réalisé un escape game en ligne, centré sur la culture londonienne des années 1920. L’originalité est bien de mise : l’escape game vous fera prendre le rôle de détective à la recherche d’un bijou volé. Les voleuses ne sont que le célèbre Forty Elephants Gang ! Au début du XXe siècle, ce sont les criminelles les plus redoutées de la capitale britannique.

LES ORIGINES DU GANG

Pour vous plonger dans l’escape game, nous allons vous parler du fameux gang de criminelles. Sa réputation date de la fin des années 1800, bien que des rumeurs parlent d’une existence dès les années 1700. Le gang doit son nom au quartier populaire Elephant and Castle, situé dans le sud de Londres. En 1916, âgée d’à peine 20 ans, la féroce Alice Diamond prend la tête du gang. Surnommée « Diamond Annie » à cause des bagues en diamant à ses doigts, ses coups-de-poing étaient redoutables, et son 1m75 inspirait le respect. Son bras-droit, Maggie Hill, avec son tempérament colérique et son alcoolisme, était tout aussi effrayante. Le gang était exclusivement composé de femmes.

En 2010, le journal The Guardian leur consacre un article. La plupart étant issue de familles pauvres, peut-être s’agissait-il d’une revanche de leur part, de voler les bijoutiers et magasins les plus luxueux de la belle et prospère capitale britannique : bijoux, diamants, or, vêtements de luxe… Elles étaient insatiables ! Leur mode opératoire était ingénieux : Les filles cousaient des poches à l’intérieure de leurs vêtements et en profitaient pour y mettre les bijoux et s’enfuir, pendant que des comparses distrayaient le personnel. Les formes des vêtements, qui étaient faites de coupes droites et amples, simplifiaient la manœuvre.

Certaines se faisaient aussi embaucher comme domestiques chez des hommes riches et les séduisaient. Elles profitaient de l’occasion pour les piller, puis les faire chanter. Profitant de ces richesses, les membres du gang vivaient une vie de luxe et d’oisiveté, et se comportaient comme si elles appartenaient à la bourgeoisie. Elles faisaient des fêtes dignes de la noblesse et dépensaient des fortunes dans la mode et les mets qu’elles consommaient.

L’ÉVOLUTION DU FORTY ELEPHANTS GANG

Le gang était aussi en collaboration avec l’Elephant and Castle gang, dont le frère de Maggie Hill, Billy Hill, faisait partie. Alice était également l’amante de Bert Mcdonald, l’un des chefs du gang, qui finira notamment par devenir le garde du corps de plusieurs célébrités, tel Charlie Chaplin. 

Le début d’une nouvelle ère pour le gang est marquée avec l’arrivée d’une nouvelle cheffe : Lilian Rose Kendall. Profitant des avancées techniques, Kendall utilisait sa voiture pour foncer dans les vitrines des boutiques. Elle entrait, pillait, et repartait. Alice, quant à elle, prend sa retraite et dirige une maison close. Vers les années 30, le gang disparaît progressivement. La plupart de ses membres les plus importants l’ont quitté et l’évolution de la mode compromet le système de « cache » qu’utilisaient les filles. Les forces de police se multiplient et beaucoup de membres du gang décident de quitter Londres pour la province.

LE PROJET D’ESCAPE GAME

Escape Gang a décidé de redonner vie aux Forty Elephants Gang, notamment en se re-situant dans le contexte des années folles à Londres, période d’après-guerre durant laquelle la culture s’est particulièrement développée. L’association étudiante, Escape Gang, a créé un escape game en ligne, qui sera accessible du 19 au 21 mars, et qui sera gratuit. Le but étant de s’amuser, bien sûr, mais aussi d’en apprendre sur le gang, et sur les “Roaring Twenties”. 

Un escape game consiste, en général, à répondre à des énigmes en équipe, et dans une limite de temps d’une heure. Le but étant soit d’accomplir une mission, soit de s’enfuir d’un lieu. Mais ça, c’est en présentiel, en ligne, le concept reste le même. Le joueur devra donc interroger les voleuses, trouver et explorer leur QG, et enfin, résoudre des énigmes qui leur en feront apprendre plus sur le gang et la culture londonienne des années folles. Il faudra faire le bon choix, sinon le bijou sera perdu !

Trailer de l’escape game

Pour mener à bien le projet, l’association a engagé deux troupes de comédiens pour filmer certaines scènes de l’escape game : Le cris de l’aube et Les comédiens du Tréteau. Nous avons eu le plaisir d’interviewer un comédien de chaque troupe : Aurélie Ramat pour Le cris de l’aube et Romane Noulé pour Les comédiens du Tréteau, qui ont interprété Dolly Mays et Alice Diamond. 

INTERVIEW AVEC LES COMÉDIENNES AURÉLIE RAMAT ET ROMANE NOULÉ

  • Comment la Covid a-t-elle impacté votre métier ?

A. Ramat : « Très honnêtement, j’ai eu de la chance. Avec mon collectif, on a essayé beaucoup de choses pour rester actifs, malgré le coup de massue qu’on s’est pris sur la tête. On a continué à jouer en extérieur, mais avec visières, puis avec masques.

Et aujourd’hui, même si on est au ralenti, il y a quelques petites formes à droite à gauche qui permettent de garder espoir, avec des petites structures qui se bougent et qui ont encore envie de se battre, et qui nous permettent d’aller vers le public, puisqu’il ne peut pas venir à nous pour l’instant. Le plus dur, je dirais, c’est justement de se battre pour maintenir ce qu’on fait, faute de soutien… »

R. Noulé : « L’impact est important, je n’ai quasiment plus de travail depuis le premier confinement. Avec la compagnie Les Comédiens du Tréteau, on avait commencé à jouer notre nouvelle pièce La Nuit de Valognes en février 2020, et à cause de la covid toutes nos dates ont été annulés et très peu reportées. Les tournages sont au ralenti, oui, il y en a, mais pas suffisamment pour permettre à tout le monde de travailler convenablement. »

  • Quelle sensation avez-vous éprouvé à l’idée de pouvoir à nouveau jouer ? 

A. Ramat : « Ça fait plaisir, et ça fait du bien. Mais ça a un goût amer quand même. Ce que j’aime dans ce métier, c’est le contact avec le public, c’est l’échange avant et après, c’est l’adrénaline de se dire que c’est maintenant et ici que tout se joue, et qu’il faut tout donner. C’est le plaisir d’aller vers les gens et de leur permettre d’accéder à ce qui se passe. Là, on devait absolument jouer dans une maison, dans les horaires impartis, entre nous, parce que se déplacer et jouer dans d’autres lieux impliquaient des masques, des attestations… Et puis la réalité, en fin de journée, de devoir vite rentrer chez soi pour ne pas être « hors la loi », alors que le but était de créer du divertissement et de la joie… c’est brutal. Mais je ne regrette pas ce tournage, il n’y a que du positif ! »

R. Noulé : « C’est un vrai plaisir ! Le fait de pouvoir créer à nouveau, de rentrer dans la peau d’un personnage, rencontrer de nouvelles personnes et de travailler en équipe ça fait un bien fou. »

  • Que pensez-vous du projet d’escape game ? Comment vous êtes-vous adapté aux personnages ?

A. Ramat : « C’est une très belle idée. Il est certain que faire un escape game en présentiel, c’est toujours mieux. Qu’il soit sous forme de jeu de société ou en salle, le but de ces jeux, enfin selon moi, c’est de communiquer avec l’autre rapidement, d’échanger sur les idées et de trouver la solution grâce à ces discussions et une répartition des tâches.

Mais cela n’étant pas possible, le basculer en jeu vidéo est très malin. Je suis très fan de jeux à choix, alors cela m’inspirait beaucoup. Je me suis mise à la place du joueur, et je me suis demandé ce que j’aimerais voir et entendre. Nos personnages à chacun.e étaient très marqués, avec des traits de caractère très différents. Je n’ai fait qu’insister sur ces traits dans mon jeu. Ça donnait envie d’aller plus loin aussi, créer des zooms sur les visages, semer le doute pour le joueur… Mais malheureusement, les conditions ne nous le permettaient pas. Néanmoins, ça reste un très bon projet qui mériterait même une deuxième session pour se développer ! »

R. Noulé : « J’ai beaucoup aimé l’idée de cet Escape Game. J’en avais déjà fait en tant que joueuse, mais non en tant que comédienne. C’est une belle adaptation de le faire en virtuel vu le contexte actuel. J’ai hâte de voir le résultat, et le fait que ce soit en ligne nous permets aux comédiens de pouvoir aussi voir le rendu ! Pour le personnage d’Alice, j’ai fait des recherches, il y avait pas mal d’informations sur elle, c’était très intéressant de découvrir son histoire, d’essayer de comprendre à travers tout ça sa personnalité et comment fonctionnait le gang à l’époque. »

  • Parlons un peu de vous : qu’est-ce qui vous a donné envie de devenir comédienne ?

A. Ramat : « Oh… Question difficile, je trouve. J’ai commencé le théâtre à 11 ans, au Conservatoire, parce que j’étais très timide. Très rapidement, je m’y suis sentie à ma place. J’aimais travailler en équipe, j’aimais m’exprimer avec d’autres mots, j’aimais dépasser mes limites et sortir de ma zone de confort. Mes cours de théâtre étaient une vraie bouffée d’oxygène pour moi, et donc très rapidement, j’ai associé ça à beaucoup de plaisir. Et qui n’a pas envie de se lever chaque matin le sourire aux lèvres en sachant que la journée qui l’attend va être un plaisir ?

Alors attention, ce n’est pas tous les jours facile. Quand on est comédienne, on est aussi administratrice, chargée de diffusion, metteuse en scène, chargée de communication…. Parce qu’il faut aller chercher les structures, les financements, il faut être créative, transmettre, s’adapter, amener du public aux événements… C’est beaucoup de désillusions aussi parfois, quand on se donne à fond dans quelque chose qui n’aboutis pas pour diverses raisons.

Mais la force de l’équipe, ça c’est la meilleure des choses. Et quand, lors d’une représentation ou d’une médiation, j’arrive à toucher des gens qui ne sont pas forcément sensibilisés au théâtre, je rentre chez moi comblée. »

R. Noulé : « J’ai voulu devenir comédienne, car c’est le moyen que j’ai trouvé pour pouvoir m’exprimer et me faire comprendre. J’aime être comédienne pour raconter des histoires, faire passer des messages et défendre des opinions, des idéaux, inspirer les gens et surtout sortir d’une routine, le fait de jouer toujours des personnages différents me donne la sensation de vivre plusieurs vies. »

  • Vous êtes-vous bien amusée ? 

A. Ramat : « Oui, vraiment beaucoup ! Ca faisait du bien de découvrir une nouvelle équipe, d’avoir pour objectif qu’en fin de journée tout soit bouclé, d’être dans un « vrai » rythme après ces semaines d’arrêt dûs à la crise sanitaire. De l’habillage à la dernière scène tournée, j’ai adoré, l’équipe était adorable. Je signe de suite s’il y a un épisode 2 ! »

R. Noulé : « Oui beaucoup ! L’équipe était top, l’ambiance était au rendez-vous. On a essayé de s’habiller au mieux pour respecter l’époque, porter des costumes, tout de suite, ça crée quelque chose. »

  • Avez-vous pu apprendre ou découvrir de nouvelles choses grâce à ce projet ?

A. Ramat : « En terme de tournage, j’avais toujours été derrière la caméra (en régie, en mise en scène) et toujours sur des longs-métrages. Alors être devant et sous un format de jeu, c’était nouveau pour moi. Appréhender la caméra n’est pas la même chose qu’appréhender un public. J’ai en plus l’habitude de faire beaucoup de théâtre de rue, d’aller chercher les gens, alors parler à un objectif n’était pas forcément évident au départ. Mais l’ambiance était très chouette et détendue donc après quelques prises, c’était réglé. »

R. Noulé : « Oui, je ne connaissais pas du tout le Forty Elephants Gang avant ce projet, j’ai adoré découvrir cet univers féminin hyper bad-ass. J’ai aussi appris plus de choses sur les années 20, ça a fait du bien à ma culture générale ! »

INFORMATIONS PRATIQUES

Si vous êtes intéressés par l’escape game, il suffit simplement de cliquer sur ce lien et de vous inscrire. Vous avez jusqu’au mercredi 17 mars pour le faire.  Vous pourrez choisir parmi les différents créneaux de deux heures qui vous seront proposés pour les jours du 19, 20 et 21 mars 2021. Alors, à vous de jouer !

Vous pouvez aussi vous abonner aux comptes facebook et instagram de l’association Escape Gang, qui publie du contenu presque tous les jours 😉

On se retrouve bientôt pour un nouvel article. À plus, mes puces ! 

Photo de couverture: ©Maxine Colard.

Logo d’Escape Gang. ©Maxine Colard.

Cet article t'a plu ? Tu aimes Exprime ? Suis nos réseaux ou fais un don !