La Renaissance est souvent considérée, à l’époque et aujourd’hui encore, comme un renouveau après la période soit disant barbare du Moyen-âge. En réalité, la Renaissance fut bien plus barbare concernant, par exemple, la liberté des femmes. Durant cette période, qui débute en Italie au XVe siècle puis se répand dans le reste de l’Europe durant le XVIe siècle, les mœurs évoluent notamment grâce à la redécouverte de la culture antique. Plongeons dans une époque ou l’homme, plus que l’humain, est remis au centre des préoccupations.
L’humanisme, penser au masculin
Pas d’inquiétude, nous n’allons pas nous attarder sur le concept, parfois un peu trop scolaire, de l’humanisme. Mais on peut quand même retenir le fait que ce mouvement de pensée s’intéresse davantage à l’homme et lui redonne de l’importance face à Dieu. Cette attitude se retrouve dans les arts tels que la peinture.
Les peintres aussi portent un grand intérêt pour les sources antiques, et redécouvrent les théories de perspectives. Ces techniques que l’on apprend en cours d’art plastique, permettent aux artistes d’améliorer leurs méthodes de travail, et de rendre leurs peintures plus réalistes.
En plus de la perspective, on étudie intensément l’anatomie humaine. L’Homme de Vitruve, de Léonard De Vinci, est un bon exemple de l’influence de l’art antique dans celui de la Renaissance. Vitruve était un architecte romain qui a rédigé des ouvrages de son travail sur les proportions du corps humain, que De Vinci et d’autres artistes reprennent ensuite. Aucun trait corporel n’est laissé au hasard et comme les statues grecques, chaque partie du corps est finement tracée. Très vite, un seul modèle de corps prime et, pour les hommes, cette carrure parfaite renvoie à une intelligence monstre et un héroïsme sans relâche.
l’habit fait l’homme
Nous l’avons bien compris, la résurgence des textes antiques accompagne le développement de la figure de l’homme de la Renaissance. Fort de son savoir, sa carrure renvoie à sa force virile et imposante.
Car dès lors, l’habit fait bel et bien l’homme, voici un bref décryptage du portrait d’Henri VIII :
- Le roi porte des manches gigot. Bouffantes, elles élargissent les épaules et le haut du buste.
- Son buste est couvert de précieux ornements, et ses habits sont faits dans de riches tissus.
- Henri VIII revêt des collants qui galbent les jambes, renforçant l’impression de musculature que renvoie déjà le haut de son corps.
- Au niveau de son pénis, se trouve une « brague », ancêtre de la braguette. Durant la Renaissance, il arrive de la rembourrer, afin qu’elle soit la plus protubérante possible. Car la brague est une fonction symbolique de la virilité, le sexe étant l’attribut par excellence du pouvoir.
« [La Renaissance artistique] est vraiment symptomatique de cet idéal humaniste, qui arrive avec la Renaissance, ou on place l’humain au centre de la création de Dieu en tant que créature parfaite crée à l’image de Dieu. Et aussi avec l’influence de l’antiquité gréco-romaine qui est alors redécouverte, avec notamment toutes ces statues aux proportions parfaites qui montrent des corps bodybuildés du côté des hommes, et des corps très sensuels du côté des femmes. »
Ludivine Gaillard – @Mieuxvautartquejamais
Beauté féminine, beauté divine
Durant la Renaissance, on commence à peindre des sujets mythologiques, et une figure féminine revient très régulièrement, c’est Vénus, déesse de l’amour, de la beauté et de la fertilité. Ce sont des femmes nues qui sont représentées, se cachant pudiquement le sexe d’une main. Leurs corps sont semblables, d’un blanc laiteux, une longue chevelure, des formes arrondies (mais pas trop, histoire de rappeler leur rôle premier, c’est-à-dire la maternité), et une attitude détournée du spectateur, voir même endormie.
Ces peintures sont si nombreuses, que cela devient un genre en lui-même : les Vénus. Il s’agit de peindre une femme présentée comme la déesse Vénus, allongée dans un décor intérieur ou de paysage, et d’exposer au spectateur sa beauté charnelle.
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« Souvent, je me demande ce qu’il nous resterait à voir dans les musées si toutes les femmes nues qui les peuplent quittaient leurs tableaux. Lasses d’être des belles choses figées, exploitées par le regard masculin, pour aller vivre leur meilleure vie loin des cadres dorés et des moulures plus très fraîches… »
Une place – Eva Kirilof
des Corps sages
À la fin du Moyen-âge et au début de la Renaissance, a lieu ce qu’on appelle le « Grand Renfermement ». Il s’agit de réduire l’autonomie des femmes en leur interdisant d’exercer de nombreux métiers et en les reléguant entre les quatre murs du foyer familial. Cette exclusion sociale fait écho à l’apparition du corset, habit qui symbolise une oppression envers les femmes et impose aux corps une forme définie, plutôt que de s’adapter aux formes de chacune.
« Ce renfermement des femmes, c’est en réalité surtout une invisibilisation. […] C’est le début d’une précarisation et d’une prolétarisation du travail des femmes qui se poursuivent jusqu’à nos jours. À partir de cette époque, les femmes doivent vivre dans un système patriarcal renforcé. »
Les grandes oubliées – Titiou Lecoq
La Renaissance est donc une époque de renouveau et de redécouvertes, avec des avancées techniques, économiques et scientifiques. Du moins dans les grandes lignes, car lorsque l’on se penche sur le sujet, on se rend vite compte que l’humanisme inspiré de l’antiquité oublie de mettre les femmes au centre, avec les hommes. Celles-ci sont déshumanisées et corsetées, tandis que des peintres exhibent des corps envoûtants sous un nom générique, celui de Vénus.
L’art gréco-romain, au fil des époques, continue d’influencer les façons de penser et de faire. Dans de prochains articles, nous nous intéresserons au XIXe siècle, ainsi qu’à notre époque actuelle… À suivre !
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