le cerf volant

Enfants du Laos

La rédac’ a parcouru le ciel du Laos à la recherche d’humains. À chaque croisement de rue, il y a découvert des enfants souriants et plein de vie. Avec eux, elle a joué au bras de fer chinois, à cache-cache, au dessin … de quoi penser qu’ils ont tout pour être heureux. En creusant un peu, nous nous rendons vite compte qu’il y a un manque : l’enseignement. Les enfants du Laos ont soif d’apprendre. Alors quels sont les éléments qui les en empêche ?

Quelle situation pour les enfants du Laos ?

Sur 7 millions d’habitants, le Laos comptabilise une population très jeune : 36,7% ont entre 0 et 14 ans et la moyenne d’âge est de 22 ans. La situation est difficile, avec une espérance de vie de 68,3 ans et une mortalité de 5% pour les moins de 5 ans. L’Indice de Concrétisation des Droits de l’Enfant estime un niveau situé dans le rouge avec un indice de 6,73/10. Autant dire que cet article ne sera pas des plus joyeux. Mais nous tenterons malgré tout de faire circuler l’espoir. Car là où la situation est rouge, nous ne pouvons que nous améliorer.

Dès la naissance, et même avant

En 2015, 200 morts maternelles sur 100 000 naissances vivantes étaient comptabilisées. Les femmes accouchent souvent chez elles, car l’accès aux centres médicaux est difficile pour ceux qui vivent dans les régions rurales du Laos. Mais ce n’est pas tout, il y a également une pénurie de médecins compétents et la religion, considérant le sang impur, oblige parfois les femmes à accoucher dans les forêts, éloignées de tout. Pour finir, une barrière ethnique s’est installée. Il existe, dans le pays, 49 groupes ethniques différents et chacun a son propre langage, ses traditions et sa culture. De quoi installer une certaine appréhension…

30% des naissances ne sont pas déclarées officiellement aux autorités laotiennes
Des enfants qui ne pourront jamais avoir accès à leurs droits.

Dans la pauvreté et le travail

La moitié des laotiens vit sous le seuil de pauvreté. Quelles conséquences pour les enfants ? La santé et le droit à l’éducation deviennent beaucoup plus difficiles d’accès. De nombreux enfants sont orphelins et doivent subvenir par eux-mêmes à leurs besoins. Beaucoup d’enfants doivent également subvenir aux besoins de leur famille. 10% des enfants travaille, pour la plupart dans les champs, la pêche ou la manufacture.

Famille Khamu (Nord Laos). Photo : Jean-Louis Potier

De mauvaises conditions sanitaires

Le Laos souffre du manque d’hygiène, de matériel et de personnel médical. Les maladies se propagent plus facilement et rapidement. En 2014, 0,5 médecins étaient comptabilisés pour 1000 personnes. L’année suivante, 36 056 cas de malarias ont été confirmés. Au Laos, vous trouverez donc tout naturellement la polio ou le tétanos, des maladies pratiquement éradiquées en Europe.

Des violences répétées

De nombreuses maltraitances se font dans le cadre familial. On estime que la moitié des enfants des rues ont fui leur foyer pour cause de violence. L’une des problématiques de ces violences est le tourisme sexuel. De nombreux enfants sont achetés par des proxénètes thaïlandais ou chinois pour être placés dans les réseaux sexuels, c’est-à-dire, pour beaucoup, dans des maisons closes ou des films pornographiques.

L’accès à l’éducation

La principale raison de la faiblesse éducative est la langue. Le programme est rédigé en lao, alors que dans les villages, on parle des langues ethniques, comme le akha. Heureusement, dans certaines écoles, les professeurs sont bilingues, mais cela n’empêche pas des frais de scolarité parfois trop élevés et résultat, 20% des enfants n’ont pas accès à l’éducation. Le soutien du gouvernement reste faible et l’éducation au Laos tient principalement grâce aux ONG pour lesquelles l’enseignement des langues est un véritable enjeu.

35% des salles de classe ont des toilettes
20% ont l’électricité

En 1996, un décret rend l’enseignement primaire obligatoire et gratuit. Les enseignements du primaire concernent l’apprentissage du lao, les mathématiques, l’art et l’éducation physique. Au secondaire, les laotiens complètent ce programme avec l’histoire-géographie, l’éducation civique, les sciences naturelles et les langues étrangères. Pour la suite, la Laos compte une université publique, Sisavangvong, ouverte en 1958 et située à Vientiane, la capitale, et deux universités bouddhiques, également à Vientiane et une autre à Champassak. Mais beaucoup d’enfants s’arrêtent après la primaire.

Classe avec des écoliers dans l’école primaire de Don Puay (Si Phan Don), Laos. Photo : Basile Morin

Plan International intervient dans 10 régions principalement dans la province de Bokéo. Leur programme de formation concerne environ 25 lycéennes issues de minorités ethniques. L’objectif est de leur donner plus facilement accès à l’école d’infirmière de Vientiane afin qu’elles deviennent sages femmes. Mais l’objectif est en réalité double : promouvoir l’éducation, leur permettre une autonomie financière, mais aussi développer les soins médicaux et l’accompagnement de la grossesse et de l’accouchement. Donc réduire la mortalité maternelle et infantile.

« Un laïc qui a fait des études de médecine et qui n’a jamais été ordonné, il ne sait pas quelle est la voie à suivre. Il pense à vouloir, à désirer. Il veut prendre, mais il donne peu. Il ne veut pas aider les autres […] Si on connaît le chemin de l’intérieur [celui appris dans un monastère] et celui de l’extérieur [celui appris à l’extérieur du monastère], c’est parfait. » Kuba Kham Ngeun, le chef du clergé bouddhiste de la province de Bokéo

Le rôle du bouddhisme dans l’éducation

La culture laotienne est empreinte de la religion bouddhiste. Ouvrez les yeux et découvrez l’architecture des vat, les temples bouddhistes. Découvrez l’empreinte du royaume khmer et siamois. Deux villes sont imprégnées, Luang Prabang et Vientiane, que l’on appelle « villes aux mille temples ».

Mais l’éducation des enfants concerne tout le pays. Heureusement, nous retrouvons des temples dans chaque ville et chaque village. En 2008, nous comptabilisions 20 608 moines pour 4 860 monastères. Pour certaines familles, envoyer leurs enfants dans les temples est la seule solution pour leur donner un enseignement et leur donner plus de chances pour des études supérieures. Beaucoup de garçons décident d’eux-mêmes de devenir moine pour accéder à cet enseignement et fuir la pauvreté.

Les écoles de monastères sont des écoles primaires, secondaires et lycées avec un enseignement bouddhique. La première école de monastère est apparue au XXe siècle et jusque dans les années 1950, l’apprentissage de l’écriture et de la lecture était principalement enseigné par les monastères. Les filles en étaient totalement exclues.

Aujourd’hui, il y a des écoles reconnues, sous la responsabilité du ministère de l’éducation et d’autres non reconnues, mais qui libèrent du temps pour l’étude dans les établissements scolaires publics. Pour les 67% de bouddhistes, les jeunes hommes doivent alors se faire « ordonner » par différents rites d’entrée : l’admission en tant que novice et l’acceptation en tant que bonze. Car les monastères n’ont pas perdu leur grande fonction religieuse et sociale. L’offrande et les services religieux constituent une part importante du lien entre les enfants des monastères et les habitants.

Durant la cérémonie des novices, les enfants remercient leurs parents avec un texte appelé « anisong buat » (les avantages de l’ordination). Ce texte prend origine dans un mythe et a également été raconté par Buddha. L’histoire narre les mérites d’une mère qui autorisa son fils à devenir novice. L’enseignement en monastère est donc considéré comme une vraie chance et fierté.

Dans tous les cas, les professeurs sont débordés et les classes surpeuplées. Certaines écoles émergent donc par des projets personnels, des écoles sont aménagées dans des espaces privés et soutenus par des volontaires étrangers. Si vous avez l’occasion d’effectuer du volontariat, l’enseignement des langues et des pratiques artistiques peut se faire de manière très ludique.

La place des filles et femmes

Ce qui définit principalement la place des filles et des femmes dans la société est le travail avec le tissu. Les mères apprennent le tissage à leur fille généralement vers l’âge de 12 ans. On dit d’ailleurs que la qualité d’une fille équivaut à la qualité de son tissage.

« Si de manière générale, le passage au monastère est une marque de l’identité masculine dans le village, l’identité féminine est définie autrement » Souvanxay Phetchanpheng – La transmission des savoirs dans les écoles et monastères au Laos

Dans l’enseignement bouddhique, la femme est très estimée, car c’est elle qui prend en charge l’éducation des enfants. Mais le code monacal interdit tout contact entre les moines et les femmes dans les écoles. Les professeurs sont donc plus proches des garçons, et dans les monastères la sociabilité est exclusivement masculine.

De manière générale, mais surtout en milieu rural, les femmes sans enfant ou stériles ne sont pas bien perçues car les enfants sont des aides pour les champs et subviennent aux besoins des parents lorsqu’ils sont trop âgés. Les jeunes filles se marient donc rapidement avec l’intention d’avoir des enfants.

Comment faire avancer les choses ?

En faisant du volontariat. Beaucoup d’ONG proposent des programmes afin de participer au développement de l’enseignement et de l’apprentissage. Vous pouvez bien entendu vous rapprocher de Plan International. Si vous êtes de passage au Laos, nous vous invitons à découvrir l’application et le site internet Workaway, sur lequel vous trouverez tout type de projet d’éducation. Pour les enfants du Laos.

L’article sur le voyage responsable en Thaïlande

Sources

Phetchanpheng Souvanxay, « ‪La transmission des savoirs dans les écoles et monastères au Laos‪ », Les Cahiers d’Outre-Mer, 2017/2 (n° 276), p. 163-175.
Plan International
Index Mundi
Global Health Observatory
Humanium

Photo de couverture : Jeanne Bailly


Cet article t'a plu ? Tu aimes Exprime ? Suis nos réseaux ou fais un don !