par J’ai découvert Le consentement de Vanessa Springora quelques temps avant son adaptation cinématographique, dans une story d’Emily Ratajkowski qui le recommandait. Ce n’est pas un livre vers lequel je serais allée de moi-même, mais ma curiosité a été piquée et je l’ai donc acheté. Dans ce livre, Vanessa Springora nous livre le récit sans détour de sa relation avec un écrivain célèbre, ici respectivement désignés V. et G., alors qu’elle n’avait que quatorze ans et lui cinquante. Le consentement est un témoignage important, que j’ai trouvé glaçant, édifiant, et extrêmement bien écrit. La plume de Vanessa Springora le rend difficile à lâcher malgré la gravité du sujet, et je pense que les lecteurs rapides le liront d’une traite.
La relation qui unit V. à G. est vraiment dérangeante, mais plus encore que leur relation, c'est l'inaction de l’entourage de V. que j’ai trouvé particulièrement révoltante. Les gens savent mais ne font rien. Peu s'insurgent de la situation, pas même la mère de V., qui de manière assez incompréhensible se rend alors complice, n'osant s'opposer à la volonté de sa fille. D’ailleurs, ce sont ses réactions que j'ai eu le plus de mal à comprendre. Vanessa Springora avance l'hypothèse de l'époque comme explication. En effet, elle a grandit à une époque où la protection des enfants est oubliée au nom de la libération sexuelle. Mais malgré tout, j’ai du mal à concevoir que sa mère ait pu tolérer une telle relation. Quant à son père, il est au abonné absent et n’est donc pas là pour la protéger non plus. V. est abandonnée et piégée dans cette relation qu’elle n’est pas capable de quitter d’elle-même.
J’ai vraiment eu de la peine pour la petite V. Même si elle a conscience que la situation n'est pas normale, à seulement 14 ans, elle n'a pas le recul ou la maturité nécessaire pour voir qu'elle est manipulée par G. Elle croit sincèrement être amoureuse de lui, et que ses sentiments sont réciproques. Mais quand le charme se dissipe et laisse place à la désillusion, V. découvre avec dégoût et horreur le vrai visage de G., ainsi que la véritable nature de leur relation. Relation qui continuera à la hanter longtemps après s’être terminée, et qui aura un impact durable sur sa vie future, en particulier dans ses relations amoureuses et intimes, ainsi que de profondes conséquences sur sa santé mentale.
Sans compter que les publications régulières des livres de G. dans lesquels elle apparaît, que ce soit sous forme de personnage ou en tant qu'elle-même dans ses journaux intimes, contribue à entretenir le traumatisme et le souvenir de cette époque, l'empêchant d'oublier et de passer définitivement à autre chose et la renvoyant systématiquement à cette période de sa vie qu'elle préférerait oublier. Le fait de voir leur relation immortalisée pour toujours dans ses livres, et qui plus est de la manière dont G. la présente, souvent éloignée de la réalité, se donnant le beau rôle et la faisant passer pour une hystérique, capricieuse, ingrate et que sais-je, représente une forme de torture psychologique qui ne la laissera pas indemne.
G. quant à lui m'a répugnée, et ce que relate Vanessa Springora à son sujet est effarant. Il a beau être probablement atteint d'éphébophilie comme elle le suppose, cela n'excuse pas le comportement odieux qu'il adopte après leur rupture (cela n'excuse évidemment pas non plus son attitude auprès des adolescent.es, mais disons que ça peut au moins l'expliquer). Son incapacité à lâcher prise, à laisser V. en paix, cherchant encore et toujours à revenir dans sa vie et récupérer l'emprise qu'il exerçait sur elle, même de nombreuses années après les faits, même alors qu'elle a depuis longtemps rompu tout contact avec lui, est tout simplement insupportable.
Vanessa Springora aborde et questionne également la question du statut privilégié des artistes, qui au nom de leur art ou de leur talent semblent être au dessus des lois. Effectivement, non seulement G. n’est jamais inquiété pour ses agissements, pourtant connus de beaucoup, mais en plus, il a l’audace de se servir de ses relations comme d’une source d’inspiration pour ses romans, relatant ses « exploits » auprès de ses nombreuses très jeunes conquêtes. Et malgré le caractère visiblement explicite de ses écrits, certains l’encense et loue son talent, occultant complètement l’aspect illégal de ce qu’il y décrit (alors que certains de ces ouvrages sont ses propres journaux intimes, rendant donc impossible de dédouaner ses propos sous couvert qu’ils relèvent de la fiction).
En conclusion, Le consentement est une lecture marquante, importante, que je ne regrette pas d’avoir lue. Le récit se veut factuel, Vanessa Springora relate sa version des faits, et grâce à ce livre, rétabli ainsi sa vérité, et quelque part aussi, celles des autres victimes de G.. On ne peut que saluer son courage d'avoir partagé son vécu dans ce livre. Si tu aimes lire des témoignages et que la pédophilie/éphébophilie et la prédation sexuelle sont des sujets auxquels tu es capable de te confronter, je ne peux que te le recommander.
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