Les Terrils du nord : Gardiens du Passé

Une pause sur les hauteurs : partons pour une virée historique à la découverte des terrils, ces montagnes artificielles qui racontent trois siècles d’extraction minière dans le Nord-Pas-de-Calais. Que vous soyez en train, en bus ou en voiture, vous apercevrez à travers la fenêtre les imposantes silhouettes noires qui ponctuent les paysages de la région.

Nous vous offrons ici un plongeon fascinant dans l’histoire minière de cette région emblématique, dévoilant comment ces collines de résidus sont devenues des symboles incontournables de notre patrimoine industriel.

Origine des Terrils

Les mines de charbon ont été les artères battantes du Nord-Pas-de-Calais, irriguant son développement industriel dès le 18ᵉ siècle en sculptant le paysage et tissant l’économie de cette région. Le charbon, véritable or noir, alimentait les usines, locomotives et foyers, propulsant la révolution industrielle et facilitant le transport grâce aux chemins de fer et canaux.

Au 18ᵉ et début du 19ᵉ siècle, les résidus miniers stériles étaient laissés dans les galeries. Les premiers terrils plats ont été créés dans les années 1850 à l’aide de paniers et de rails. Plus tard, des formes coniques ont émergé, construites mécaniquement par rampes ou téléphériques.

Terrils jumeaux de Loos-en-Gohelle. Photo : Isaline G.

Les terrils sont des collines de résidus issus du tri de charbon, de schiste et de grès. Le terril houiller le plus haut d’Europe se trouve à Loos-en-Gohelle, dans l’ancien bassin minier de la région. Il culmine à 188 mètres, surpassant ainsi le plus haut sommet de la Flandre, le Mont Cassel.

Certains terrils sont monumentaux, suscitant un sentiment de gigantisme, comme le terril 14 à Auchel. Dans le Nord-Pas-de-Calais, on recense officiellement 350 dépôts de schistes, dont approximativement 200 subsistent aujourd’hui. Ces montagnes artificielles sont désormais reconnues comme des supports de mémoire et font partie du patrimoine mondial du Bassin minier Nord-Pas-de-Calais.

Lieu de Rencontre et d’Évasion

Les terrils, témoins silencieux des vestiges de l’histoire minière, sont aussi des lieux de rassemblement et d’échange. Loos-en-Gohelle par exemple, propose sept circuits d’interprétation, matérialisés par des bornes explicatives, permettant de plonger dans l’histoire et le patrimoine de la commune. Pour une expérience interactive, une application mobile fournit des informations détaillées, transformant chaque visite en un véritable voyage dans le temps.

Pour ceux qui préfèrent découvrir les terrils à leur propre rythme, la visite liberté est idéale. Seuls ou en petits groupes, les visiteurs peuvent suivre les potelets d’information disposés sur le parcours, observer la flore locale et apercevoir quelques oiseaux rares.

7 circuits et des visites liberté pour découvrir et comprendre la trajectoire de Loos-en-Gohelle

Les terrils se transforment également en terrain d’aventure pour les amateurs de sport. Le Trail des Pyramides Noires et d’autres événements sportifs permettent de redécouvrir ces montagnes sous un autre angle. La base du 11/19 de Loos-en-Gohelle est particulièrement aménagée pour les balades et randonnées familiales.

Au sommet de ces monts, les regards se croisent, les générations se rencontrent, et les histoires se tissent au fil du panorama. Emblématiques de la région, les terrils ajoutent leur charme singulier à ce paysage nordiste. Prendre un moment de répit au sommet d’un terril, c’est s’offrir une parenthèse dans le temps.

Des Vestiges Historiques aux Symboles culturels

Pour enrichir notre lecture des terrils, tournons-nous vers Germinal d’Émile Zola. Ce roman explore la condition ouvrière dans le bassin minier avec une profondeur et une humanité inégalées. Les terrils, symboles poignants de la souffrance des mineurs, témoignent de l’exploitation acharnée des bassins houillers. D’autres créations culturelles et artistiques reprennent l’image des terrils :

Aujourd’hui, en parcourant les terrils de la région, nous pouvons enrichir notre visite en la complétant par cette perspective artistique et culturelle. Les terrils, souvent vus comme de simples curiosités locales, sont en réalité des témoins d’une histoire profonde et complexe, qui mérite d’être redécouverte et revalorisée.

Et si les terrils du Nord de la France étaient considérés comme un centre d’attraction touristique, au même titre que le Grand Canyon du Colorado ou les pyramides d’Égypte ?

La Cabale des oursins documentaire de Luc Moullet

Explorons-les non seulement pour leur beauté naturelle, mais aussi pour leur richesse patrimoniale, et laissons-nous guider par les récits qui ont marqué notre imaginaire collectif.

Terrils

Évasion en hauteur, en gardant les pieds sur terre,

Là où les âmes d’antan se rencontrent,

Là où les regards d’aujourd’hui s’enrichissent,

Chargé de mémoire, témoignage d’une vie brûlée,

Noirs de nature, ils attirent les regards.

Sentinelles de mémoire,

Témoins des labeurs passés, des vies consumées.

poème de Genylazy

Un écosystème unique

Les terrils du Nord-Pas-de-Calais offrent aujourd’hui des espaces de nature et de convivialité. En préservant ces sites, nous honorons la mémoire des générations de mineurs et protégeons un paysage unique, riche de sens et de beauté. On y trouve la quiétude nécessaire pour se retrouver, se ressourcer, et contempler la vue imprenable sur les plaines verdoyantes et les champs environnants. Là-haut, on s’évade, on se perd dans la beauté brute de la nature, loin du tumulte quotidien.

Ajonc nain, flore des terrils

Les sols des terrils, pauvres en nutriments, ont été colonisés par des plantes pionnières adaptées à ces conditions extrêmes. On y trouve notamment l’ajonc nain, la bruyère cendrée, la potentille tormentille et la luzerne, qui enrichissent le sol en azote.

Ces monticules offrent un habitat varié pour la faune locale. Les terrils abritent des insectes comme les papillons et les grillons, des oiseaux tels que l’alouette des champs et le pipit farlouse, des reptiles comme le lézard des murailles, et des petits mammifères tels que le campagnol terrestre et la musaraigne.

La préservation de cette biodiversité est essentielle. Le Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) Chaîne des Terrils œuvre depuis 1989 pour la réhabilitation et la gestion de ces écosystèmes. Des sentiers de découverte sensibilisent les visiteurs à la faune, la flore et l’histoire minière de la région.

Le terril 14 à Auchel, photo : Hubert Bouvet pour la région Nord-pas-de-Calais

Que ce soit pour une balade en famille, une rencontre entre amis, ou simplement pour méditer face à l’horizon, les terrils du Bassin minier sont des lieux où l’histoire et la modernité se rejoignent, où le passé et le présent se mêlent harmonieusement. Ils sont les gardiens de notre patrimoine et les sentinelles de notre imaginaire collectif.


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