Vous avez déjà dû entendre parler de l’azote liquide, ou plus communément appelé gaz hilarant faisant fureur ces derniers temps. De plus en plus connu, l’azote est devenu un incontournable de la cuisine moléculaire. Ce gaz obtenu par liquéfaction de l’air est incolore et inodore.
Mais pourquoi l’azote ?
La question vous vient sûrement, pourquoi et quel est l’intérêt de l’utilisation de ce gaz dans nos assiettes ?
Avant tout petit point scientifique, l’azote est un minéral présent sous différentes formes dans l’air, le sol et les êtres vivants. Il se transforme alors en état gazeux lors de sa dégradation par les microorganismes.
Ce gaz compose majoritairement l’atmosphère terrestre sous forme de diazote. On doit l’isolation de cet élément à Rutherford en 1772, mais le terme « azote », sera quand à lui proposé par Lavoisier et forgé depuis le grec, signifiant « privé de vie » car, contrairement à l’oxygène de l’air, l’azote ne contribue pas au vivant. Il est présent naturellement dans le compost, le sang séché, les excréments d’oiseaux ou encore les cendres de bois.
L’azote liquide a la propriété de refroidir très rapidement les ingrédients et préparations avec lesquels il entre en contact. Ce gaz extrait les arômes des aliments en formant de minuscules cristaux de glace dans leur structure interne. Ainsi ces micro cristaux rendent la dégustation de l’aliment d’autant plus intense, car ces derniers amplifient notre perception gustative.
En cuisine l’azote sert d’agent de refroidissement, il n’est donc jamais ingéré. L’aliment sera dégusté après évaporation du gaz, n’entraînant alors aucun risque pour notre santé.
L’azote en cuisine
Passons maintenant au côté pratique. L’utilisation de ce gaz permet de créer un contraste impressionnant entre les températures ou textures d’un met. On nomme cela la cuisine moléculaire.
La cuisine moléculaire fut inventée par Nicolas Kurti et Hervé This. Ces deux physico-chimistes révolutionnent la cuisine traditionnelle en créant des réactions chimiques avec nos aliments. L’une des premières et par conséquent l’une des plus célèbres de leurs création reste l’œuf parfait alliant qualité des saveurs et textures tout en maitrisant physiquement la cuisson.
Depuis, plusieurs inventions culinaires ont vu le jour à partir de l’azote, telles que les glaces nitrogènes, les cocktails impressionnants au nuage blanc, ou encore les poudres de légumes. Tous les grands chefs se l’arrachent et l’utilisent à des fins gastronomiques les plus délirantes les unes que les autres.
On peut alors déguster un aliment avec un cœur chaud et un contour extrêmement froid, ou encore des aliments généralement liquides à l’état solide. Cette substance cryogénique permet enfin de congeler de l’alcool pour confectionner des cocktails originaux, ce qui n’est pas possible avec les techniques de congélation traditionnelles.
De nos jours cet ingrédient est très prisé du fait de son effet scénique sur les plats ou boissons, enveloppant ces derniers d’un nuage blanc fuyant suscitant toujours beaucoup d’étonnement. Son utilisation impressionne, comme avec la cuisson d’une meringue minute ou la création d’une crème glacée dès lors de son contact avec l’aliment. Mais ce qui attire la convoitise de beaucoup reste « l’effet dragon », une fumée blanche sortant des narines de son consommateur.
Son utilisation et ses dangers
Néanmoins, l’utilisation de cet élément n’est pas sans risque. Il est donc important de prendre des mesures de prévention face à l’utilisation de l’azote, pour éviter tout risque d’asphyxie ou de brûlure. Il est d’ailleurs recommandé de ne pas manipuler et stocker de l’azote liquide dans des locaux de volume inférieur à 20m3 ou d’utiliser des locaux souterrains pour le stockage. De plus, chaque appareil utilisé pour exploiter ce gaz doit faire l’objet d’un entretien et d’une maintenance à intervalle régulier.
Malheureusement les effets de ce gaz sont sous estimés. Plusieurs blessures associées à l’ingestion d’aliments et de boissons contenant de l’azote liquide ont été rapportées. Brûlures, asphyxie, perforation gastrique…
Chez vous, vous pouvez tout à fait réaliser une recette rapide à base d’azote liquide. Le plus facile restera une boisson, et par conséquent un cocktail. Pour le préparer, commencez par verser 75 ml de Grey Goose dans un verre glacé saupoudré de vermouth Noilly Prat. Frottez une gousse de vanille sur le bord des verres. Décorez avec une olive sphérique, versez de l’azote liquide pour créer un effet de glace. Mais gardez à l’esprit que ce gaz reste dangereux ! Si vous ne souhaitez pas vous y risquer, vous pouvez tout à fait tester l’effet « fumée blanche » chez un professionnel qualifié. La rédac’ vous a dégotter quelques adresses.
La rédac’ a testé !
Deux adresses nous viennent en tête quand on parle d’azote.
Tout d’abord le bar Le Joker, situé 29 place Louise de Bettignies à Lille, propose une multitude de cocktails maison pour tous les goûts avec bien sûr certains d’entre eux à l’azote. Ces boissons nous en mettent plein la vue et nous impressionnent tout autant. Votre barman vous apporte un verre recouvert d’un tonneau, puis le soulève créant ainsi une tornade blanche vaporeuse.
Notre deuxième adresse se trouve chez nos voisins britanniques. En effet au sein du marché populaire de Camden se trouve la chaîne de cuisine moderne Chin Chin ice cream laboratorists au 49 Camden lock place. Ils y fabriquent des glaces nitro à base d’une crème anglaise aromatisée plongée et secouée dans une cuve de 180 litres d’azote. La crème est instantanément refroidie, donnant alors une crème glacée onctueuse et triplement goûteuse. On peut même y ajouter des toppings !
Un peu plus loin Dans l’hexagone…
André Daguin, l’ancien chef de l’hôtel de France, a été le premier chef à se servir de l’azote liquide en cuisine. Le Gersois raconte : « Je voulais mettre au point une glace au pruneau à l’armagnac. Je cherchais le symétrique négatif de la friture, un moyen d’obtenir une température de – 180° qui ne génère ni odeur, ni goût, ni couleur. Et puis un jour, quelqu’un m’a dit : ce que tu cherches, tu le trouveras au centre d’insémination artificielle d’Aubiet où l’on conservait la semence des taureaux… dans de l’azote liquide. Ç’a été miraculeux ». (Forum gastronomique de Gérone, 2018)
Mais le personnage le plus éclectique de notre ère en matière de gastronomie moléculaire reste le célèbre chef Thierry Marx. Le chef parisien explique « C’est comprendre les mécanismes de transformation d’un produit quand on le travaille, savoir ce qui se passe quand à partir de 56°C des albumines se transforment pour attendrir la viande.
Pourquoi un soufflé gonfle ou un œuf coagule. Lorsque vous identifiez certains paramètres, vous pouvez aller plus loin dans la juste cuisson des produits, apprendre à faire des émulsions stables, des écumes qui ont du goût. Ce sont des mécanismes qui vous servent à évoluer. Dans l’histoire, c’est toujours la science qui a fait évoluer la cuisine. » (Entretien avec LyonCapital, 2010)
Si vous souhaitez allez plus loin dans cette expérience gustative inédite vous pourrez en apprendre davantage à La cité des sciences et de l’industrie, à Paris, ou tout simplement vous rendre dans l’un des restaurants étoilés du chef Thierry Marx, comme par exemple, Sur mesure, au mandarin oriental, Paris.
Enfin l’azote nous régale tant par son coté visuel que par son côté gustatif grâce à l’amplification des saveurs alimentaires. Il permet de repenser la gastronomie moderne en cassant les codes alimentaires traditionnels. L’essayer c’est l’adopter !
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