Devenue essentiel pour comprendre le monde qui nous entoure, la profession de journaliste a connu de nombreuses évolutions au fil de l’histoire. Dans cette série d’articles, nous retracerons ses transformations, ainsi que son influence sur la société. Pour ce premier volet, intéressons-nous au traitement de l’information avant l’invention de l’imprimerie, avec l’aide de Louis Autin, maître de conférences en langue et littérature latines.
Tout d’abord, définissons le terme de journalisme. D’après le Larousse, il peut se décrire comme une manière d’écrire ou de présenter des événements, propre aux journalistes. Les historiens situent ses origines à la naissance de l’imprimerie, bien loin des JT télévisés et de l’essor des podcasts, mais, dès l’Antiquité, l’information demandait déjà à être traitée.
À cette époque, pas de journaliste, pas de carte de presse, mais déjà la nécessité de transmettre et de partager des informations auprès des populations. C’est notamment le cas des différents pouvoirs, soucieux d’informer les habitants sur des sujets liés à la vie des cités. Différents moyens de communication vont alors voir le jour en s’adaptant à des populations qui, souvent, ne savaient pas lire, alors adeptes de la transmission par voie orale.
Ainsi, les crieurs publics, positionnés sur les grandes places, firent leurs apparitions, afin d’annoncer les dernières nouvelles aux populations. Des messages écrits vont malgré cela voir le jour, notamment au sein de l’Empire romain, avec les Acta Diurna (journal quotidien), considéré comme l’ancêtre du journal. Ces planches, que l’on retrouvait dans les espaces publics, relataient des informations comme des naissances ou des décès de personnes importantes, des mariages, des décisions politiques, ou encore des événements.


Même si la présence de crieurs publics et des Acta Diurna permirent la transmission d’informations de manière officielle, le bouche-à-oreille restait la manière la plus rapide de diffuser les nouvelles au plus grand nombre.
Deux modes de diffusion coexistaient :
- Les diffusions informelles reposent sur une transmission orale d’individu à individu, souvent confondue avec la rumeur.
- Les diffusions officielles prennent la forme de relations écrites, comme des lettres confiées à des messagers, utilisant les moyens de communication du pouvoir.
Bien qu’on puisse le penser, le pouvoir n’avait aucun contrôle sur le développement des rumeurs au sein des grandes cités. Cela ne l’empêchait toutefois pas de tenter d’en stopper la propagation.
« Il arrivait que le pouvoir tente d’arrêter la circulation d’une rumeur, mais ces tentatives étaient souvent couronnées d’échecs, provoquant même l’effet inverse et donc une plus grande diffusion. »
Louis Autin, maître de conférences en langue et littérature latines et auteur de travaux sur le sujet.
La place de l’information prend progressivement de l’ampleur au sein des populations et va, par ricochet, provoquer la création d’une opinion publique. Cette dernière pouvait donner lieu à des actions collectives, parfois sous forme de rébellions, afin d’affirmer et de partager cette opinion qui émergeait au sein du peuple.
« À titre d’exemple, il arrivait que la plèbe de Rome décide, de son plein gré, d’arrêter de travailler pour une période, sans que le sénat leur en donne l’ordre.«
Louis Autin
Au Moyen-Âge et dans l’Antiquité, les guerres constituent un sujet majeur de conversation, surtout lorsqu’elles se rapprochent des cités et quand les enjeux politiques deviennent importants. Le développement de nouveaux moyens de communication devient alors nécessaire pour partager les nouvelles de guerre aux population. Une nécessité d’autant plus forte pendant l’Antiquité, en raison de la centralisation des informations à Rome, malgré l’immensité de l’Empire romain.
Des moyens plus professionnels vont donc voir le jour dans les armées, permettant la circulation des informations militaires. C’est notamment le cas du Cursus Publicus, un service de transport qui permet, pour les messages les plus importants, de circuler rapidement au sein de l’Empire.
« L’évolution technique est très souvent liée à des techniques militaires et l’Antiquité n’échappe pas à cette règle. On assiste alors à une circulation de l’information plus professionnalisée, avec, au sein des armées, des personnes responsables de l’acheminement des nouvelles et disposant des infrastructures nécessaires pour le faire. »
Louis Autin

Les rumeurs, bien quelles puissent porter sur de nombreux sujets, pouvaient parfois entraîner l’apparition de stéréotypes. Les populations juives et chrétiennes en étaient principalement la cible.
« Il y avait par exemple les rumeurs sur les rites des chrétiens et l’idée métaphorique que l’on mange le corps du Christ, ce qui étonnait beaucoup les Romains et a donné lieu à des stéréotypes négatifs et racistes.«
Louis Autin
Ce cheminement, allant de la rumeur aux stéréotypes négatifs, n’était toutefois pas systématique. Lors du grand incendie de Rome en 64, Néron, alors empereur, tenta de rejeter la culpabilité sur les chrétiens, mais ne reçut pas le soutien des populations, malgré la propagation de stéréotypes à leur égard.
« La population, qui devrait normalement, compte tenu des stéréotypes négatifs sur les chrétiens, être d’accord avec Néron, va finalement prendre en pitié ces chrétiens que l’on tue sans raison et va diriger sa colère contre l’empereur. »
Louis Autin

Avant l’invention de l’imprimerie, ni la fonction de journaliste ni le concept de journalisme n’existaient, mais l’information jouait déjà un rôle central. Entre canaux officiels et rumeurs, sa transmission façonnait l’organisation et la vie des cités. Dans le prochain article de cette série : imprimerie et Révolution française façonnent les premiers périodiques.
Article réalisé par Hugo, stagiaire Exprime.

L’histoire du journalisme, notre série été 2025.
BOnus : la reco média d’une bénévole – par Ganaelle
Je lis Mediapart, pour leurs enquêtes qui sont très souvent incroyables et accablantes pour les personnalités politiques. Je pense que c’est un journal très important car il met en lumière des choses graves et qui doivent être amenées dans le débat publique. Je m’informe aussi via YouTube et Twitch où je suis des passionnés de politique qui décryptent la politique. Jean Massiet par exemple, ou Clément Viktorovitch.
Cet article t'a plu ? Tu aimes Exprime ? Soutiens-nous en faisant un don !